Les avis d'une libraire-lectrice

J'ai la prétention de dire que je lis, en moyenne, 4 romans par semaine. A travers ce blog, vous pourrez vérifier si je n'exagère pas car je vais y mettre tout ce que je lis : romans, albums jeunesse, BD,... Dévoré, apprécié ou vite abandonné, chaque livre fera l'objet d'un petit commentaire.

mardi 31 juillet 2012

Le mari de la libraire a lu pour vous et moi


En ces temps de jeux olympiques, petit podium hétéroclite de mes lectures juillettistes.
Tout d'’abord, un roman à la construction haletante, La vérité sur l’'affaire Harry Quebert. Sans jamais perdre son lecteur, Joël Dicker propose de multiples mises en abîme. Comme dans une très bonne série, tout y fonctionne à merveille et les 648 pages de ce roman ne sont pas de trop pour déployer toute la virtuosité de cette histoire à tiroirs.
Sur la base d’un roman policier, Joël Dicker a écrit une véritable tragédie antique et contemporaine qui nous parle des multiples facettes de notre personnalité, de trahison et surtout d'’amour. Ce type de livre offre de beaux jours au genre romanesque . J’'aurais encore beaucoup d'’éloges à faire sur ce roman mais je vous laisse vous faire votre propre opinion ... (fin septembre)
C'’est dans Inséparables d’'Alessandro Piperno que j'’ai pu lire les plus drôles (et belles) pages sur l'’orgasme et l'’impuissance. Ici aussi l'’être humain est au centre du récit. À travers le prisme de deux frères, Piperno écrit les réussites et les échecs ... avec une fin splendide.
Je termine par ma première lecture de ces vacances : Théorème vivant du mathématicien Cédric Villani. Ce récit plaira aux curieux. Au fil des pages, on comprend qu'’il existe d'’autres langages pour comprendre l'’univers, dont celui des mathématiques. Ponctué de portraits de grands noms des mathématiques, Cédric Villani écrit la chronique de sa quête de résolution et de célébrité. Comme un sportif de haut niveau, l'’auteur ne fait jamais preuve de fausse modestie et fait part avec sincérité des efforts accomplis. 

Le dieu de New York, L.Faye, Fleuve Noir

Nous sommes à New York en 1845, au moment où une loi instaure officiellement le département de police de la ville, la NYPD. Envers et contre tout/tous, Timothy Wilde, 27 ans, va être engagé comme agent de police après avoir tout perdu dans l'incendie de son quartier. Affecté au 6ème département qu'il arpente à longueur de journée, il sera bousculé par une enfant à la chemise imprégnée de sang. Commence alors une enquête qui le conduira dans les milieux de la politique, des conflits sociaux et religieux et des bordels. Dans une atmosphère à la Dickens revisité, l'auteure nous fait partager un très bon moment historico-policier mêlé de sentiments et de tension dans des dialogues argotiques savoureux. Très agréable lecture qui nous change des polars traditionnels.

La nuit des corbeaux, J.Connolly, Presses de la Cité

Charlie Parker est un privé et il est engagé par l'avocate Aimée Price et son client, Randall Haight, comptable dans la petite ville de Pastor's Bay. Un ado a disparu et Haight craint qu'on découvre son passé de tueur d'enfant quand il était adolescent. Tout s'emmêle alors : police municipale, FBI, dealers de Boston, guerre des gangs, indics. Charlie va alors enquêter mais il gêne les officiels et risque de perdre sa licence pour entrave à la police. Intrigue bien fagotée un peu enfouie dans la description des lieux mais la tension monte au fur et à mesure et certains personnages ne sont pas ceux qu'on croit. Polar agréable à lire.

mardi 24 juillet 2012

Ecarlate, H.Jordan, Belfond

Bon, pas de couverture non plus pour ce roman à paraître en octobre chez Belfond.
Pour moi, deux raisons de lire cet ouvrage reçu la semaine dernière en avant-première : l'auteure dont j'avais déjà lu et aimé le premier roman paru en français : Mississipi, disponible en poche, chez 10/18. Et le titre évidemment : ou plutôt le roman auquel elle fait référence et dont elle propose une "revisitation" et qui a donné le nom de ma librairie.
Hannah va aimer un homme, tomber enceinte de lui, avorter et se faire condamner car elle ne peut et ne veut révéler le nom de son amant. Le tout dans une société (légèrement) futuriste ou le puritanisme et la religion ont (re)pris le pouvoir.
Même si le roman est un peu tiré par les cheveux et qu'il contient certains passages dont je me serais passée, j'ai apprécié l'histoire dans son ensemble et vibré avec l'héroïne.

Noces de sel, M.Fermine, Albin Michel

A l'époque, j'avais été subjugué par L'apiculteur, puis par Neige, deux romans courts de Fermine que mon fils m'avait fait découvrir. Il est de ces romans qui laissent des traces, des stigmates agréables. Vous devez ouvrir ce petit écrin qu'est la couverture de Noces de sel et découvrir le petit bijou qui s'y cache : c'est une petite ode pleine de tendresse et aux senteurs salines de Camargue. 
« Dans toute la ville voguait un étrange parfum où se mêlaient le sel et les entêtantes fragrances des fleurs, bouquet opiacé et enivrant dont les effluves seraient, des heures plus tard, absorbés par le buvard de la nuit. » (p. 57) « Treize jours de fête s'annonçaient. Une bacchanale infernale, une orgie dionysiaque, un feu de la Saint-Jean en octobre. Le temps de prendre le taureau par les cornes et de se sentir un dieu parmi les hommes. » (p. 77). 
Le livre, une fois refermé, on a envie de l'ouvrir à nouveau et de le relire pour revivre ce petit moment de bonheur divin !

Invitation à un assassinat, C.Posadas, Seuil

Olivia, 43 ans, récemment divorcée de son 5ème mari, va se retrouver bientôt complètement ruinée. Pour finir « en beauté » et fêter son 5ème divorce, elle décide d'inviter 8 personnes, qui ont chacune une bonne raison de l'assassiner, sur le luxueux Sparkling Cyanide, le yacht de son ex qui ne va pas tarder à être saisi (les deux !). 
Récit en trois parties : avant, pendant, après ! Avant : où Olivia se présente ainsi que ses invités sous formes de longs monologues intérieurs des uns et des autres. Pendant : la mise en scène où Agata, la soeur, est l'observatrice des faits qui se déroulent durant le court périple. Après : où Agata se prend pour Miss Marple d'Agatha Christie et va tenter de découvrir lequel des sept autres invités a pu assassiner sa soeur. C'est un récit autant psychologique que sociologique à la manière des auteures anglaises de polars, mais en plus désinvolte ; ce qui plaira sans doute davantage à un lectorat féminin. 

jeudi 19 juillet 2012

Intrigue à Venise, A.Goetz, Grasset


Les « écrivains français de Venise » sont menacés d'assassinat si le fameux tableau de Rembrandt ne réapparaît pas, tableau qui n'a jamais été répertorié nulle part. C'est l'occasion pour l'auteur ne nous balader d'abord à Rome, à la villa Médicis puis dans Venise. Tantôt décriée, tantôt sublimée, la Sérénissime sert de décor à cette intrigue littéraire dont une grande partie est constituée d'une leçon d'histoire de l'art. 
Venise est un écrin à qui sait la visiter : dès que vous entendez parler allemand ou japonais, prenez la 1ère « calle » et perdez-vous dans les six « sestieri » avec en main « Les balades de Corto Maltese » (Casterman 1999) pour éviter d'être un pigeon de plus sur la Piazza San Marco et ses pièges à touristes d'un jour. 
Le récit de Goetz est vrai, plaisant et agréable à lire, savant mélange d'intrigue et de culture.

mardi 17 juillet 2012

Derrière la haine, B.Abel, Fleuve Noir

Ou De l'autre côté de la haie : deux couples avec un enfant dans deux maisons mitoyennes. Un drame et le bonheur explose. Paranoïa de l'une ou machiavélisme de l'autre voisine ? Petit à petit, l'intrigue se crée et l'angoisse monte. Facile et efficace.

Profanation, J.Adler Olsen, Albin Michel


Où l'on retrouve avec beaucoup de plaisir les deux complices de Miséricorde : l'inspecteur Mørck et son « assistant » Assad le Syrien. Relégués au Département V, créé spécialement pour le dérangeant Mørck, qui s'occupe de rouvrir des affaires classées, les deux compères assistés de Rose Knudsen dont personne ne veut, vont être confrontés à un dossier qui a miraculeusement atterri sur le bureau de l'inspecteur pendant ses vacances. L'affaire remonte à vingt ans et concerne des ados qui se la jouaient à la « Orange mécanique », mais ces jeunes fils à papa sont devenus des personnages haut-placés et influents de la société danoise. 
Une intrigue extrêmement bien ficelée et au suspens implacable. Si vous avez aimé  Miséricorde (2011), alors vous ne serez absolument pas déçu. 

dimanche 15 juillet 2012

L'invisible, R.Pobi, Sonatine

Il n'y a que les auteurs nord-américains (ici, canadien) pour nous offrir des thrillers aussi bien ficelés ! L'invisible porte bien son nom : à plusieurs reprises persuadée d'avoir trouvé le tueur, j'ai dû à chaque fois faire marche arrière et reconnaître que je n'avais en réalité rien vu venir !
Jake, agent du FBI au passé extrêmement lourd trouvera-t-il celui qui écorche ses victimes vivantes ?
Ames sensibles s'abstenir...

jeudi 12 juillet 2012

La peau de l'ours, Zidrou et Oriol, Dargaud

Coup de coeur de l'éditeur. Coup de coeur pour moi également !
Très bonne BD en un tome qui nous parle de mafia, de crimes, de vengeance et d'amour,... agrémentée d'une pointe d'érotisme juste ce qu'il faut. Avec un dessin (qui m'a fait penser aux Triplettes de Belleville) qui sert parfaitement le propos.

Encre, F.Trias de Bes, Actes Sud

Pourquoi est-ce que je rentre si bien dans les oeuvres de ces auteurs espagnols : Pérez-Reverte, Ruiz Zafon, Somoza, Trias de Bes ? ? Je ne connais pas la réponse tout comme Johann Walbach, libraire en prêt, et Sebastian von der Becker, mathématicien, qui cherchent tous deux la « raison de leur infortune » et qui tentent de découvrir la réponse et retrouver ainsi un sens à leur vie. 
Avec Encre - quel titre judicieux !, on revisite les « artisans » du livre : libraire-bibliothécaire, auteur, imprimeur, encreur, correcteur, éditeur, lecteur, à travers l'histoire d'un livre à l'encre éphémère. Grâce à leur opiniâtreté, chacun va aller au bout de sa quête en ayant accompli son « grand oeuvre ». 
Tout est empreint de fantastique, d'émotion et de sentiment : un monde où l'atmosphère littéraire vous enveloppe d'une aura de sérénité, loin des futilités de ce monde. Quelle conséquence peut avoir une seule goutte d'encre sur la vie d'un homme ? Si vous êtes lecteur, vous comprendrez !

La recette du pigeon à l'italienne, A.Berenboom, Genèse

Dans une ambiance belgo-italienne et brusselo-liégeoise arrosée de chianti, de gueuze grenadine et de pekèt, Michel Van Loo, ket de Bruxelles et détective privé naïf et maladroit va enquêter sur la mort par empoisonnement de Simeone, le pigeon campiossimo d'Ignazio Lisone, import-export et rabatteur de main-d'oeuvre italienne pour les mines de Grâce-Berleur. 
Nous sommes en 1949, c'est l'après-guerre : le gouvernement belge et les « vautours » partis politiques, résistants italiens et ecclésiastiques vont se donner la main pour exploiter les pauvres paysans de Calabre, des Pouilles, de Ligurie, du Piémont et des autres régions italiennes dans les mines liégeoises, carolorégiennes, celles du Limbourg et les autres. 
A travers ce roman-polar aux accents italo-belges et aux touches d'humour belge, le détective Van Loo, frère de Tintin quelque part, va nous rappeler cet épisode oublié de l'histoire belge de l'exode de ces milliers d'Italiens à qui la Belgique promettait le paradis et qui leur offrait en réalité des conditions de vie misérables. Une honte ! A travers un récit qui se veut léger, l'auteur a le talent de toucher à des choses très sérieuses. Ça c'est de l'art typiquement belge. Une découverte pour moi !

mardi 10 juillet 2012

Le blues du braqueur de banque, F.Jensen, Gaïa


Où l'on découvre dès le début de l'intrigue le nom du meurtrier, celui de la victime et l'arme du crime. C'est pas banal, non ? Mais il reste le mobile ! Max, fidèle ami et conseiller du 1er ministre, tue Tom, le 1er ministre, à l'aide d'une bouteille de Glenfiddich de 30 ans d'âge (vous savez celle qui est triangulaire et qui ressemble à un Toblerone en plus grand et en plus solide ! On aurait pu choisir un Red Label ou un Johnny Walker , mais Glenfiddich, c'est plus classe, non ?). Le narrateur, le braqueur de banques, veut relater les faits que lui a racontés Max le génie. On a droit alors à un récit complètement déjanté, surréaliste au style teinté d'un humour « braque » (voir la couverture) à la limite du burlesque. « Nous voilà presque revenus où tout avait commencé, la boucle est bouclée, je peux enfin raconter l'histoire depuis le début ; maintenant que nous savons comment va se terminer ce qui ne va pas tarder à commencer. » et « Où Tom trouve lui-même un moyen pour que ce qui se passe mal se passe bien. Mais ça se passe mal ! Ça aurait pu se passer bien, et c'était presque le cas ? mais alors ça s'est pal passé. C'est pas bien. » Réflexions de l'auteur, dérision et aphorismes « Il s'en va des ministres comme des couches jetables ; il faut les changer souvent. ». Surprenant, déstabilisant, désopilant, fascinant, génial. C'est comme le bon vin, ça réjouit le coeur de l'homme.
 

Je suis la marquise de Carabas, L.Bordes, Liana Lévi

Récit et/ou roman, ce texte nous raconte l'envoûtante histoire d'un célèbre théâtre de marionnettes qui a officié des dizaines d'années, à travers la France, à partir de 1850. Plongé dans l'univers à la fois dur et fantasmatique de ce métier, on vit et souffre avec son fondateur, ses enfants, l'arrivée du cinéma muet, puis parlant.

mercredi 4 juillet 2012

La mémoire de l'eau T1 et 2, V.Vernay et M.Reynès, Dupuis


BD complète en deux tomes autour d'une légende, ou plutôt d'une malédiction qui frappe la famille Normann depuis des décennies. Marion, ayant déménagé avec sa maman dans le village d'enfance de cette dernière, va découvrir petit à petit les secrets du phare et de l'homme étrange qui y habite. 
Albums réussis tant graphiquement qu'au niveau du scénario : selon moi, dès 10-11 ans, on peut s'y plonger.

Et il dit, E.De Luca, Gallimard

D'ordinaire, je suis fan de cet auteur italien contemporain, dont l'écriture proche de la poésie est toujours un grand moment de lecture. Ici, malheureusement, je suis passée à côté de ce texte que je ne sais comment qualifier : mystique, religieux,...? Pas pour moi.

Hanna était seule à la maison, C.Gerhardsen, Fleuve Noir


Tout semble bien calme au commissariat de Hammarby et le commissaire Conny Sjöberg va pouvoir profiter de son week-end en solitaire. C'est sans compter avec trois affaires qui surviennent tout à coup : un bébé découvert entre la vie et la mort dans un buisson, le cadavre d'une jeune femme non loin de là, une adolescente trouvée étranglée dans les toilettes d'un ferry. Les équipes de Sjöberg se partagent les enquêtes. Et puis, il y a Hanna, 3 ans, seule à la maison, abandonnée par sa maman partie avec son petit frère malade. On passe ainsi d'une enquête à l'autre avec des intermèdes qui relatent les problèmes personnels des différents enquêteurs. Tout s'emmêle au point que tout s'embrouille et tout n'est pas toujours cohérent, mais le suspens est là et sauve l'intérêt de ce polar venu du nord. 

dimanche 1 juillet 2012

Les désorientés, A.Maalouf, Grasset

Pas encore de couverture disponible pour ce titre dont la sortie est prévue le 5 septembre.
L'éditeur, présent à Bruxelles, nous a dit de ce roman qu'il était pessimiste. J'en ai donc commencé la lecture avec cette idée en tête. Je réfute ces propos. J'ai trouvé cette histoire de retrouvailles nostalgique, touchante, mélancolique, langoureuse aussi,...
A la mort de Mourad, des amis d'enfance vont se retrouver dans leur pays d'origine, que certains ont quitté, dans lequel d'autres sont restés, avec lequel tous ont vécu. Une longue histoire de préparatifs, une courte fin abrupte et habile. Une belle réussite.
Etrangement lu en même temps que le visionnage de Persepolis de M.Satrapi. Le hasard m'étonne toujours.