Les avis d'une libraire-lectrice

J'ai la prétention de dire que je lis, en moyenne, 4 romans par semaine. A travers ce blog, vous pourrez vérifier si je n'exagère pas car je vais y mettre tout ce que je lis : romans, albums jeunesse, BD,... Dévoré, apprécié ou vite abandonné, chaque livre fera l'objet d'un petit commentaire.

mardi 5 janvier 2010

Honecker 21, J.Y.Cendrey, Actes Sud


Un livre étrange où alternent des pages hilarantes, des scènes savoureuses, des observations fines sur la solitude contemporaine et la société de consommation, de belles descriptions de Berlin et des passages plats, sans ressort. On a l'impression que l'auteur s'est évertué à coller des scènes bout à bout en se disant que si l'ensemble était traversé par le fil rouge d'un même personnage paumé (l'Honecker du titre), cela pourrait faire un roman. Mais ce n'est pas tout à fait raccord, on voit trop les coutures ou, tout simplement, cela n'a pas été suffisamment travaillé.
A chaque carrefour, l'auteur a choisi le développement narratif le plus improbable, mais la surprise, au lieu d'être jouissive, s'avère frustrante, décevante. Pourquoi, par exemple, Honecker veut-il tromper sa femme sensible et cultivée avec une prostituée moche et sourde-muette? Quelle est la logique? L'attrait des contraires? Un problème avec sa môman? L'envie d'une relation reposante qui n'engage à rien? Aucune explication ne tient réellement la route. A partir de ce moment-là, le livre s'effiloche, part en lambeaux, jusqu'à la scène finale, qui aurait pu être magistrale dans le tragicomique mais qui, pathétiquement dérisoire, me semble ratée.
Il y aurait sans doute eu moyen de mieux exploiter le thème de la panne de voiture. Et quand, à la toute fin du livre, le narrateur retrouve les aventures de Simplicissimus, le grand héros picaresque allemand, sur le plancher de sa voiture, on se dit que l'idée était très bonne, car Honecker est bien une sorte de Simplicissimus moderne, mais on regrette que l'auteur n'ait pas annoncé la métaphore plus tôt dans le roman avant de la reprendre dans la scène finale.
Bref, l'auteur avait beaucoup de belles cartes en main: le Berlin contemporain, le couple moderne perturbé par l'arrivée d'un bébé, la culture versus l'argent, l'électroménager qui vous laisse tomber (la scène de la machine à café est excellente), la servilité de l'homme moderne à l'égard de son patron, le hasard qui gouverne nos vies, un portrait de l'Allemagne moderne et d'un anti-héros allemand par un Français (ce qui n'est pas courant), etc. Malheureusement, à l'image de son personnage, il n'a pas su en profiter et déployer son jeu.
J'ai eu envie d'aimer ce livre - pour ses combats, ses décors, la femme d'Honecker -, je l'ai même adoré dans les cinquantes premières pages, et puis mon intérêt s'est peu à peu délité. Dommage!

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